Electrolux ZC24/10FS Bedienungsanleitung Seite 9

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LeMonde Job: WMQ1604--0010-0 WAS LMQ1604-10 Op.: XX Rev.: 15-04-99 T.: 10:51 S.: 111,06-Cmp.:15,11, Base : LMQPAG 27Fap:100 N
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FRANCE
LE MONDE / VENDREDI 16 AVRIL 1999
Une « doctrine de Monroe » européenne ?
Alain Peyrefitte, sénateur (RPR) de Seine-et-Marne et ancien mi-
nistre de De Gaulle, évoque, dans Le Figaro du 15 avril, une « doctrine
de Monroe européenne » face à la « prise de possession de l’Europe par
Washington ». Rappelant que le président américain James Monroe
avait énoncé, au début du XIX
e
siècle, le principe selon lequel « seuls
des Etats d’Amérique pouvaient se mêler des affaires américaines »,
M. Peyrefitte demande : « Le temps ne viendra-t-il jamais où l’Union
européenne osera tenir le même langage ? »
De son côté, le maire de Bordeaux, Alain Juppé (RPR), a affirmé,
mercredi 14 avril, sur LCI, que l’OTAN ne doit pas « être une ONU bis,
qui s’érige en gendarme de l’Europe et du monde » et qu’il faut « préci-
ser ses missions », ainsi que l’« équilibre entre Américains et Euro-
péens ». « On voit apparaître une politique étrangère européenne. En
revanche, nous n’avons pas de bras séculier », a observé l’ancien pre-
mier ministre et ancien ministre des affaires étrangères.
Daniel Cohn-Bendit critique
les Américains
« A BELGRADE, quelqu’un a eu
le courage d’écrire sur un mur :
"Slobodan, encore combien de
guerres ?" En luttant contre Milose-
vic, nous luttons aussi pour la Ser-
bie », a déclaré le philosophe An-
dré Glucksmann, lors de la réunion
publique organisée, mercredi
14 avril, à Paris, par la revue de
Bernard-Henri Lévy, La Règle du
jeu, avec l’écrivain albanais Ismaïl
Kadaré. Du cinéaste Romain Gou-
pil à l’anthropologue Véronique
Nahum-Grappe, en passant par
Muhamedin Kullashi, philosophe
originaire du Kosovo, et Daniel
Cohn-Bendit, une dizaine d’intel-
lectuels, ainsi qu’un représentant
de l’UCK, ont appelé à un renfor-
cement de l’action de l’OTAN et à
un projet de reconstruction de
cette zone dévastée.
Le chef de file des Verts aux élec-
tions européennes a analysé les di-
vergences entre Américains et Eu-
ropéens, critiquant les accords de
Dayton, qui ont « sauvé Milosevic
alors qu’il était en train de perdre ».
Se félicitant que les Européens
s’opposent à toute idée de parti-
tion du Kosovo et que, selon lui, ils
en aient convaincu Madeleine Al-
bright, M. Cohn-Bendit demande
que des débats parlementaires
aient lieu dans tous les pays de
l’OTAN et que l’Union européenne
installe au Kosovo un protectorat
qui mette en place le processus dé-
mocratique. Il plaide pour un bud-
get de reconstruction analogue au
plan Marshall et pour « un pacte
où toutes les minorités soient respec-
tées ».
Une oratrice s’est présentée
comme une Française d’origine
serbe. Tendue, elle a dit que cer-
tains Serbes sont bouleversés par
ces cohortes d’hommes et de
femmes victimes du régime de
Belgrade. « La haine détruit aussi
ceux qui haïssent », a-t-elle insisté.
Comme en écho, M
me
Nahum-
Grappe, rappelant la « cruauté ex-
ceptionnelle » de la guerre menée
par Slobodan Milosevic, a affirmé :
« Actuellement, ce qui menace le
plus les habitants de Belgrade, ce ne
sont pas les bombes, c’est la honte. »
Catherine Bédarida
A droite, du soutien à Jacques Chirac à la dénonciation des « eurobéats »
DEPUIS le 24 mars, date des
premières frappes de l’OTAN, le
président du RPR, Philippe Séguin,
observe un silence prudent. Avant
de partir pour la Réunion et
Mayotte, d’où il revenait jeudi
15 avril, il avait accordé deux en-
tretiens, au Parisien et au Journal
du dimanche, indiquant notam-
ment qu’il n’entendait pas
« s’adonner à une géostratégie de
café du commerce » et qu’il faisait
confiance au président de la Répu-
blique et – c’est à souligner – au
premier ministre.
M. Séguin juge l’intervention
« courageuse et conforme à l’action
engagée par le président de la Ré-
publique en faveur de la paix dans
cette région ». Il regrette toutefois
que, dans un premier temps, la
Russie ait été tenue à l’écart, que
l’Europe n’ait pas son propre sys-
tème de sécurité collective et
qu’elle en soit réduite à faire appel
aux Etats-Unis. « Dire cela n’est
pas minimiser le soutien que nous
apportons à l’action du président de
la République », a-t-il précisé, le
12 avril, à la Réunion.
A l’exception de l’aile nationale-
républicaine du mouvement gaul-
liste – représentée notamment par
Robert Pandraud, Jacques Myard
ou Lionnel Luca –, qui donne vo-
lontiers dans l’antiaméricanisme,
la majorité du RPR se range, par
réflexe légitimiste, derrière le pré-
sident de la République. « Les gens
de chez nous qui se sont posé des
questions au début ont été ébranlés
à la fois par la fermeté du président
et par celle de l’opinion publique »,
témoigne le député de Paris Pierre
Lellouche. C’est le cas de ségui-
nistes tels que Nicole Catala ou
René André.
b La surenchère d’Alain Ma-
delin. Soutenant l’action du pré-
sident de la République, mais vou-
lant se démarquer, dans la mesure
du possible, de celle du gouverne-
ment et se placer un pas en avant
de son partenaire RPR, Alain Ma-
delin, président de Démocratie li-
bérale et numéro deux de la liste
conduite par M. Séguin aux élec-
tions européennes du 13 juin, s’est
rendu en Albanie. Il reproche au
gouvernement de freiner l’accueil
des réfugiés du Kosovo. A la dif-
férence de M. Séguin, qui redoute
un « embrasement » de la région,
l’ancien ministre joue volontiers
les va-t-en-guerre, en regrettant
« que l’on n’ait peut-être pas dé-
ployé dans le même temps [que les
frappes aériennes] une force ter-
restre, celle qui, nécessairement, de-
vra venir au Kosovo après accord
que je souhaite –, et sans accord
si, par malheur, il devait en être ain-
si ». M. Madelin n’exclut pas, en
outre, qu’il faille « armer l’UCK »,
l’Armée de libération du Kosovo.
b L’Europe de demain. « Heu-
reusement que nous sommes là pour
soutenir Jacques Chirac ! », ironise
volontiers François Bayrou. Le
président de l’UDF ne manque pas
de souligner qu’il a personnelle-
ment approuvé les deux dernières
interventions télévisées de
M. Chirac, quand M. Séguin lais-
sait son porte-parole, François Fil-
lon, parler au nom du RPR,
M. Madelin n’étant pas plus ba-
vard. Pourtant, s’il convient, en
réunion publique, qu’il est « juste
d’avoir dit "non" » au président
serbe, le président de l’UDF s’ap-
pesantit davantage sur les réserves
que lui inspirent les moyens choi-
sis. « L’idée qu’il puisse y avoir le
début d’un enchaînement dans la
poudrière des Balkans nous fait
peur. (...) On ne peut intervenir sans
risque, dans une situation historique
si complexe, avec une guerre », a-t-
il expliqué, mercredi 14 avril, lors
d’une réunion à Annonay, dans
l’Ardèche.
M. Bayrou explique ensuite en
quoi cette crise illustre la nécessité
de donner à l’Europe un bras poli-
tique et militaire, thème essentiel
de sa « précampagne » électorale.
« Si l’Europe avait existé, elle aurait
eu un modèle à proposer aux Bal-
kans. Les moyens d’action auraient
sans doute été différents. On aurait
probablement pu éviter la guerre »,
a-t-il affirmé à Annonay. M. Sé-
guin se prononce aussi pour une
défense européenne, mais en liai-
son avec la Russie, avec laquelle il
propose d’établir de nouveaux
liens institutionnels. Ancien pré-
sident de la commission de la dé-
fense de l’Assemblée nationale et
porte-parole du RPR, M. Fillon es-
time à ce propos que « plus d’Eu-
rope, cela veut dire moins d’OTAN »
et qu’une telle perspective néces-
site une réforme des institutions
politiques.
b Les opposants à la guerre. Ils
viennent des rangs des « souverai-
nistes ». Lionnel Luca, député
(RPR) des Alpes-Maritimes et pré-
sident du Cercle des gaullistes dis-
parus, ou Raymond Triboulet, an-
cien ministre du général de Gaulle
et président de l’Union des anciens
députés gaullistes, ont pris posi-
tion contre la guerre en Yougo-
slavie.
De retour de Belgrade, Marie-
France Garaud a estimé que « cette
guerre est d’une malhonnêteté intel-
lectuelle et morale absolument
scandaleuse ». Autre proche de
Charles Pasqua, l’écrivain Paul-
Marie Coûteaux a expliqué, le
11 avril, aux cadres de Demain la
France, que la guerre dans les Bal-
kans est « une entreprise de divi-
sion de l’Europe » engagée par les
Etats-Unis pour « casser les nations
européennes les plus fières ».
Par comparaison, MM. Pasqua et
Philippe de Villiers font figure de
modérés. Pour le premier, les évé-
nements de Yougoslavie illustrent
l’absence d’Europe politique. «Les
"eurobéats" ont précipité l’Europe
dans les bras des Américains », ex-
plique le second. Pour M. Pasqua,
« la France a perdu toute capacité
d’initiative en rentrant dans
l’OTAN ». Il rappelle que, selon les
principes posés par le général de
Gaulle, « la France reconnaît les
Etats, elle ne reconnaît pas les ré-
gimes ».
Le sénateur des Hauts-de-Seine
approuve cependant l’implication
de la Russie dans la recherche
d’une solution et le recours à
l’ONU. Il ne croit pas que
MM. Chirac et Jospin soient favo-
rables à l’indépendance du Kosovo.
M. Pasqua est partisan d’une dé-
fense européenne indépendante,
sans lien de subordination avec les
Etats-Unis, mais se demande qui
acceptera d’en supporter le coût.
Cécile Chambraud
et Jean-Louis Saux
TROIS SEMAINES après le dé-
clenchement des frappes de
l’OTAN en Yougoslavie, la cam-
pagne des élections européennes
pourrait bien reprendre ses droits.
Il lui aura fallu pour cela faire
brutalement – peau neuve. Les
états-majors des listes engagées
dans la compétition du 13 juin
tentent d’adapter leur message
aux attentes de l’opinion, dont
l’attention est monopolisée par la
guerre contre la Serbie. L’effort
consenti est récompensé lors des
réunions publiques. Comme l’a dit
Robert Hue, lors d’une réunion
publique en Moselle, le 13 avril (Le
Monde du 15 avril), en réponse à
une question : « Vous avez dit que
le débat sur la guerre en Yougoslavie
mettait entre parenthèses le débat
sur les européennes. Ce qui se passe
au Kosovo montre le contraire. »
Et le secrétaire national du PCF
d’enchaîner sur le suivisme de
l’Europe vis-à-vis des Etats-Unis,
qui, « par l’intermédiaire de
l’OTAN, ont imposé une stratégie qui
n’est pas la nôtre ». Les mots va-
rient, mais le constat, d’un bord à
l’autre de l’échiquier politique, est
peu ou prou le même. Passé le
temps des réactions favorables
ou hostiles aux frappes aé-
riennes, chacun s’est vu invité à
commenter la prédominance amé-
ricaine dans l’OTAN, d’autant plus
prégnante que l’ONU a été court-
circuitée par l’intervention de l’Al-
liance atlantique.
Virulente à l’extrême droite, au
PCF ou dans les rangs des « souve-
rainistes » du RPR, la dénonciation
de l’emprise américaine est re-
layée, à gauche et à droite, mezza
voce, au sein des partis qui consti-
tuent l’« union sacrée » autour du
chef de l’Etat et du premier mi-
nistre. Elle s’est traduite par de
nombreux appels à la réintégra-
tion des Nations unies – et de la
Russie dans le processus en
cours, qui ont conduit le premier
ministre, Lionel Jospin, à infléchir
son discours en ce sens lors de son
intervention à l’Assemblée natio-
nale, le 6 avril.
REFUS UNANIME
A l’approche du sommet du cin-
quantenaire de l’OTAN, prévu les
24 et 25 avril à Washington, des
voix se sont élevées, refusant le ca-
ractère festif donné par les Améri-
cains à cette rencontre. Président
de la commission des affaires
étrangères et de la défense du Sé-
nat, le centriste Xavier de Villepin
s’en est ému auprès du premier
ministre, le 7 avril. Son homologue
de l’Assemblée nationale, Paul
Quilès (PS), a demandé au gouver-
nement, le 13 avril, d’« intervenir
auprès de l’OTAN » pour obtenir le
report de ce sommet, position aus-
sitôt approuvée par le porte-pa-
role du RPR, François Fillon, pour
qui il faut « transformer » ce som-
met « en réunion de travail sur la
crise au Kosovo ». D’autant, a-t-il
ajouté mercredi, que la réunion
prévue à Washington « doit mar-
quer un pas de plus dans la nouvelle
stratégie de l’OTAN, qui se traduit
par une extension de son rôle en Eu-
rope, alors que tout le monde s’ac-
corde à dire qu’il faut plus d’Europe
en matière de sécurité ».
Le refus unanime de la prédomi-
nance américaine ouvre le débat
sur une défense européenne. Ce
qui n’a pas pu voir le jour depuis
l’échec de la Communauté euro-
péenne de défense, en 1954, est dé-
sormais réclamé sur tous les bancs.
François Hollande, premier secré-
taire du PS, a réaffirmé, mercredi
lors de son premier déplacement
de tête de liste, dans le Pas-de-Ca-
lais, comme à la réunion des lea-
ders socialistes européens, à
Bruxelles –, qu’il faut utiliser la
campagne européenne pour
« faire progresser cette idée d’Eu-
rope de la défense ».
« Il faut une Europe de la défense
avec une capacité d’intervention
lorsqu’il y a une crise dans notre en-
vironnement immédiat », a affirmé,
le 9 avril à Strasbourg, François
Bayrou, président de l’UDF. «Il
faut intégrer des bataillons natio-
naux dans une force européenne »,
nous a déclaré, mercredi, le pré-
sident du groupe UDF de l’Assem-
blée nationale, Philippe Douste-
Blazy, tandis qu’Yves Cochet
(Verts, Val-d’Oise) souligne « l’ur-
gence de construire une Europe po-
litique comprenant une dimension
d’Europe de la défense ».
C’est une autre conception, sans
lien avec l’Union européenne, que
suggère Philippe Séguin lorsqu’il
regrette – le 12 avril, à la Réunion –
que l’Europe ne se soit « dotée
d’aucun système de sécurité collec-
tive qui lui soit propre et qui puisse
rassembler (...) toutes les nations in-
téressées à la stabilité et à la paix sur
le continent, la Russie comprise ».
De même, dans un « point de
vue » cosigné avec Max Gallo (Le
Monde du 2 avril), Charles Pasqua
(RPR) affirmait qu’« il n’est nulle
solution, dans les Balkans comme
ailleurs en Europe, sans une Europe
européenne » et que « l’indépen-
dance de sa défense en est l’indis-
pensable pierre de touche ».
L’ÉVOLUTION DE ROBERT HUE
« L’Europe, qui n’est pas un Etat,
a-t-elle besoin d’une armée ? (...)
J’avoue préférer que l’Europe contri-
bue en priorité à de nouvelles avan-
cées dans le désarmement, à l’inter-
diction de l’arme nucléaire et du
commerce des armes », écrivait
M. Hue dans son livre Commu-
nisme, un nouveau projet, publié au
début de l’année. Cependant, le
11 avril, sur Europe 1, le secrétaire
national du PCF a constaté que la
situation au Kosovo montre qu’«il
y a besoin de moyens militaires ».
Tout en refusant l’idée d’une ar-
mée européenne, il s’est prononcé
en faveur d’une « coordination des
politiques de défense euro-
péennes ».
« Les communistes auront du mal
à aller plus loin », estime Jean-
Louis Bianco (PS, Alpes-de-Haute-
Provence), qui rappelle que, dans
cette perspective, ne manquerait
pas de se poser la délicate question
des « modalités du partage du
commandement ». M. Bianco sou-
ligne que « la défense européenne
reste une idée vague, qui n’est pas
facile à mettre en œuvre ».
D’autres, comme MM. Fillon et
Quilès, manifestent une certaine
exaspération devant la multiplica-
tion des déclarations sur le sujet
qui s’accompagnent d’un silence
quant aux modalités de la mise en
œuvre. Dénonçant une « gesticula-
tion verbale », M. Quilès, ancien
ministre de la défense, souligne
que ceux qui prônent aujourd’hui
une Europe de la défense « vont
peut-être hurler » lorsqu’il s’agira,
demain, d’examiner les crédits af-
férents. Désabusé, il s’attend à ce
que, « dès que le conflit du Kosovo
sera terminé, on en parle moins ».
Jean-Baptiste de Montvalon
De nouvelles lignes de clivage surgissent à « gauche de la gauche »
ARLETTE LAGUILLER et Alain Krivine ont
été obligés, eux aussi, d’intégrer la crise yougo-
slave dans leur campagne pour le scrutin du
13 juin. Alors que ni la guerre du Golfe, ni le ré-
férendum sur le traité de Maastricht, ni le
« mouvement social » de décembre 1995
n’avaient modifié les contours des courants de
la « gauche de la gauche », le télescopage de la
campagne européenne et de la guerre au Koso-
vo y fait naître des clivages plus profonds. Pour
la première fois depuis la signature d’une pro-
fession de foi commune, en janvier, les deux
chefs de file de l’extrême gauche aux élections
européennes ont éprouvé le besoin de publier,
le 13 avril, dans Libération, un texte commun de
« cadrage » au sujet du Kosovo. Un accord mi-
nimal en trois points s’est dégagé entre les deux
formations : demande d’arrêt conjoint des
« bombardements de l’OTAN » et de la « poli-
tique de purification ethnique de Milosevic » ;
« autodétermination du peuple du Kosovo ». Du
sort des réfugiés, en revanche, il n’est pas ques-
tion.
« HYPOCRISIE AMÉRICAINE »
Le même jour, à Ivry-sur-Seine, dans le Val-
de-Marne, en plein bastion communiste, c’est
sur ce point que le porte-parole de la Ligue
communiste révolutionnaire a pourtant
commencé son discours, devant une assistance
de plus de cinq cents personnes, en fustigeant
l’« opération d’intoxication » qui consiste à pré-
senter « tous ceux qui sont contre la guerre (...)
comme des partisans de Milosevic et de la purifi-
cation ethnique » ou bien à les traiter de « mu-
nichois ». M. Krivine voit la marque de l’« hypo-
crisie américaine » dans le fait que « rien n’était
prévu pour les milliers de réfugiés ; cela prouve
qu’ils se moquent éperdument du peuple du Ko-
sovo ».
De même, la porte-parole de Lutte ouvrière a
d’emblée témoigné de son « indignation » de-
vant les événements. Soulignant que «les
crimes des uns n’excusent pas ceux des autres »,
elle a jugé « écrasante la responsabilité des
grandes puissances ». « Le peuple kosovar n’a
rien à attendre » d’elles, a conclu M
me
Laguiller,
car « les dirigeants occidentaux finiront par s’en-
tendre avec Milosevic ou son successeur, consa-
crant le rapport de forces créé sur le terrain ».
Entre les deux organisations trotskistes, c’est
au sein de la LCR, déjà en proie à un vague à
l’âme identitaire créé par son alliance avec
Lutte ouvrière, que le trouble est le plus ma-
nifeste. Au malaise lié au discours incantatoire
sur la guerre en Yougoslavie et à l’absence de
propositions pour les réfugiés, est venue
s’ajouter une cassure, avec l’émergence de trot-
skistes « républicains » qui ont annoncé, mer-
credi 14 avril, leur ralliement à la Fondation
Marc-Bloch, qui réunit des « nationaux-répu-
blicains » de gauche et de droite. Dans une tri-
bune, intitulée « Pour la République autogé-
rée », publiée dans le bulletin de cette
fondation, neuf membres de la LCR indiquent
que la gauche radicale « garde la tête dans les
brumes du passé ». « Le modèle libéral, qui veut
dominer la planète, n’est pas seulement écono-
mique. C’est une vision globale du monde et des
relations sociales (...). La logique des "mouve-
ments sociaux" ne peut à l’évidence plus suffire :
il faut une réponse spécifiquement politique. » Le
bureau politique de la LCR s’est réuni, jeudi
matin, pour entendre François Morvan, chef de
file de ce courant qui, selon Christian Picquet,
membre de la direction, « a fait un acte de rup-
ture en prônant l’union des républicains des deux
rives ».
TROUBLE À LA CGT
Le conflit au Kosovo a aussi provoqué un
trouble à la CGT, même s’il ne s’exprime pas
publiquement. L’organisation a revu son dis-
cours anti-intervention, qui, chez certains de
ses militants, comme lors de la manifestation
parisienne du 1
er
avril, s’était mué en soutien
aux Serbes « contre l’agression de l’OTAN ». Ou,
comme dans L’Hebdo-CGT (ex-Vie ouvrière), en
défense de l’« influence russe dans la région des
Balkans ». Comme l’a expliqué le secrétaire gé-
néral de la confédération, Bernard Thibault,
mercredi, sur RTL, si la CGT souhaite que
« l’ensemble des combats cessent », c’est d’abord
parce qu’elle « a vraiment le sentiment » que le
conflit « s’éloigne des objectifs affichés, à savoir
une mise en cause du régime » serbe « et du pre-
mier responsable de ce régime, Milosevic ».
Alain Beuve-Méry
ÉLECTIONS
La campagne des
élections européennes du 13 juin,
étouffée, dans un premier temps,
par la guerre contre la Serbie, de-
vient maintenant le cadre d’un débat
sur les questions soulevées par ce
conflit. Les responsables politiques
de tous bords sont amenés à se pro-
noncer sur le rôle de l’OTAN, sur les
rapports entre l’Europe et les Etats-
Unis. La plupart d’entre eux
prennent position pour une défense
européenne, mais hésitent à en pré-
ciser les contours et, surtout, le coût.
b A L’EXTRÊME GAUCHE, de nou-
veaux clivages apparaissent, certains
dénonçant en priorité la domination
américaine et « libérale », tandis que
d’autres partagent la responsabilité
de la guerre entre le pouvoir serbe et
les Occidentaux. b A DROITE, si le
soutien à Jacques Chirac est majori-
taire, des voix discordantes se font
entendre chez les « souverainistes »,
détracteurs de l’Union européenne.
Les responsables politiques font chorus pour une défense européenne
La suprématie américaine et la tournure prise par la guerre contre la Serbie changent les termes du débat en vue des élections du 13 juin.
Les réunions publiques des candidats sont l’occasion pour eux de prendre parti sur la capacité de l’Europe à assurer sa popre sécurité
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